Violences sexuelles liées aux conflits : la MINUSMA forme ses officiers des Droits de l'Homme

20 février 2015

Violences sexuelles liées aux conflits : la MINUSMA forme ses officiers des Droits de l'Homme

Lorsque l’on parle de violences sexuelles, il ne s’agit pas uniquement de viols. Il en existe d’autres comme la prostitution forcée, la stérilisation forcée, l’esclavage sexuel ou encore le mariage forcé... Représentant le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme des Nations Unies (HCDH), les Officiers des Droits de l’Homme de la MINUSMA déployés au Mali ont pour mission de surveiller, de documenter et de rapporter toutes les formes de violations des droits de l’Homme, y compris celles dites sexuelles et liées au conflit.

 

C’est pour permettre aux chargés de droits de l’Homme de mieux les identifier et de mieux les traiter que cet atelier a été organisé. Selon Guillaume Ngefa, Chef de la Division des droits de l’Homme de la MINUSMA et représentant du Haut-commissaire aux Droits de l’Homme des Nations Unies : « L’objectif principal de cette formation est d’outiller nos collègues, qui font déjà un travail de surveillance de monitoring et de documentation pour les autres cas de violation des droits de l’Homme, afin qu’ils puissent utiliser une méthodologie appropriée pour ces cas, qu’ils aient une stratégie de réponse appropriée et aussi une manière de documenter ces cas ». Cette formation fait suite à une autre dispensée l’an dernier, relative au monitoring, l’investigation et la documentation de la situation des droits de l’Homme en général.

 

Cette formation intitulée : « Cours de formation du HCDH sur le monitoring  et l’enquête de la violence sexuelle liée au conflit » a débuté Mardi 17 février à l’Hôtel El Farouk. Trois jours durant, les participants ont abordé de nombreux sujets dont : « Le mandat et le rôle de la composante des droits de l'homme dans la mise en œuvre des arrangements MARA » ; « Clarification des définitions et des éléments constituant les différentes formes de violence sexuelle » ; « Rappel de la méthodologie de monitoring et d'enquête sur la violence sexuelle liée au conflit » ; ou encore « La coordination avec les partenaires et le renvoi ». Adressé aux officiers de la Division des Droits de l’Homme, ce cours était également ouvert à celles et ceux de la Protection de l’Enfant et de la Protection des Femmes : « Nous associons régulièrement nos collègues avec lesquels nous partageons un pan de notre mandat : ceux qui sont en charge de la protection de l’enfant, la protection des femmes ou encore celle des civils », a précisé M. Ngefa. 

 

Une méthode participative, interactive et pratique

 

Dispensée par Cristina Michels, Officier des Droits de l’Homme de la section Méthodologie, Education et Formation au Haut-Commissariat à Genève, accompagnée de Bernadette Sene, Conseillère Principale de la Protection de la Femme et Emilya Cermak, Chargée des Enquêtes auprès de la Division des Droits de l’Homme de la MINUSMA, cette formation s’est tenue selon la méthodologie de formation générale du HCDH telle qu’exposée dans l’ouvrage « Formation aux Droits de l’Homme : Guide de Formation à l’Intention des Professionnels (2000) ».

Travail en groupe, discussions, projections de vidéos ou utilisation de cartes, sont quelques-uns des éléments de cette méthodologie qui se veut participative, interactive et pratique. Elle permet une assimilation plus facile des concepts dispensés, mais également un partage d’expérience : « Ce n’est pas un monologue. Comme on sait qu’il y a beaucoup d’expérience dans le groupe, on compte beaucoup sur les participants pour échanger leurs expériences, les bonnes pratiques… Parce que c’est en apprenant des collègues, en sachant ce qui se fait ailleurs, que l’on accroit les capacités et les compétences » a expliqué Cristina Michels.  M’bouillé Konaté, Officier des Droits de l’Homme à Gao apprécie particulièrement la méthode employée : « C’est une méthodologie conseillée en matière d’andragogie (formation des adultes), elle est efficace en ce sens que tout le monde participe et avec l’interactivité elle est animée. Elle est parfaitement adaptée »

 

Quels changements au quotidien sur le terrain

 

C’est universel : les victimes de violences sexuelles ont souvent du mal à faire part des agressions dont elles ont fait l’objet. C’est un peu plus palpable dans le nord du Mali où, le cadre de référence culturel rend le plus souvent la question tabou. Les victimes rechignant à témoigner du fait de la stigmatisation et de l’exclusion sociale qui peut en découler, ce qui constitue souvent un frein aux enquêtes et aux sanctions visant les auteurs de ces crimes.

 

A ce jour, peu de cas de violences sexuelles liées au conflit ont été documentées et rapportées au Mali. Ce paramètre, ainsi que d’autres tout aussi importants, ont été pris en compte par la formation, ce qui devrait améliorer le traitement de ces cas sur le terrain : « Durant la formation, nous avons mis l’accent sur : comment établir la confiance avec les victimes, la société civile et les différents acteurs impliqués pour leur faire comprendre l’importance de rapporter ces cas et de les documenter. Cela permettra aux collègues d’avoir plus d’outils pour identifier les cas, établir des relations et pouvoir en faire le suivi, »souligne Cristina Michels.

 

Il est à noter que selon le Ministère de la femme, les viols perpétrés au Nord du Mali ont porté sur des femmes de tous âges. Si la question des Violences Sexuelles Liées aux Conflits fait l’objet d’une telle attention de la part des Nations Unies, ce n’est pas seulement parce que des violences sexuelles ont eu lieu au Mali, mais c’est aussi parce que dans d’autres conflits, ces violences ont été utilisées comme armes et stratégies de guerre visant à affaiblir et humilier l’ennemi. Ce qui ne semble pas être le cas en ce qui concerne le conflit qu’a connu le Mali : « Sur la base des informations qui existent, il n’est pas possible d’affirmer que les violences sexuelles ont été utilisées comme arme de guerre au Mali, » dit Cristina Michels avant d’ajouter que « cela nous veut pas dire que ça ne pourrait pas être le cas », une prudence qui explique la volonté de la MINUSMA de préparer ses chargés des droits de l’Homme et de la protection (des enfants, des femmes et des civils), à toutes éventualités, et ce, afin d’accomplir le mandat qui leur a été confié par le Conseil de sécurité des Nations Unies.