Le 29 juin 2022, le Conseil de sécurité a approuvé la résolution 2640 (2022) renouvelant le mandat de la MINUSMA pour une nouvelle année
Mandat de la Mission
Adoptant la résolution 2640 (2022) au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité a prolongé le Mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) pour une année supplémentaire, jusqu'au 30 juin 2023 en maintenant ses 13 289 soldats et 1 920 policiers.
La principale priorité stratégique de la MINUSMA reste l’appui à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (« l’Accord »), ainsi que la transition politique.
Le Conseil a en outre maintenu la deuxième priorité stratégique, qui est de « faciliter la mise en œuvre d'une stratégie malienne globale à orientation politique pour protéger les civils, réduire la violence intercommunautaire et rétablir l'autorité et la présence de l'État ainsi que les services sociaux de base dans le centre du Mali ».
La résolution 2640 (2022) demande également au Secrétaire général de mener tous les trois mois une évaluation approfondie de la situation dans le Nord et le Centre du Mali, de la transition et de la configuration de la Mission en ce qui concerne la mise en œuvre de ses priorités stratégiques, y compris relatives aux droits de l’homme.
Prenant acte de la décision du Gouvernement de transition malien de proroger de 24 mois la période de transition à compter du 26 mars 2022, notant les efforts déployés pour promouvoir le dialogue et jeter les bases des réformes à venir ; renouvelant son soutien au travail de médiation de la CEDEAO ; réaffirmant que l’ONU et les autres partenaires internationaux restent fermement attachés à l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger (« l’Accord ») pour instaurer la paix et la stabilité à long terme au Mali ; reconnaissant les efforts déployés par le Comité de suivi de l’Accord (CSA) pour renforcer son application ; constatant avec inquiétude et exprimant sa vive impatience face au retard persistant pris dans l’application de « l’Accord » ; soulignant que l’instauration d’une paix et d’une sécurité durables dans la région du Sahel passe nécessairement par des efforts conjugués sur le plan politique et dans les domaines de la sécurité, du maintien de la paix et du développement durable, au profit de toutes les régions du Mali, et par la mise en œuvre intégrale, effective et inclusive de l’Accord, de façon à garantir la participation entière, égale et véritable des femmes et des jeunes, et se félicitant à cet égard de la représentation accrue des femmes dans le CSA, le Conseil de sécurité demande instamment la reprise des réunions de tous les organes chargés d’assurer l’exécution de l’Accord et de prendre rapidement des mesures fortes, effectives, concrètes et irréversibles pour mettre en œuvre les dispositions de l’Accord concernant la politique, la sécurité, la réconciliation et le développement, et rappelle qu’il est prêt à réagir en appliquant les dispositions (sanctions) prévues par la résolution 2374 (2017) si les parties se livrent à des hostilités en violation de l’Accord ou prennent des mesures qui entravent, qui compromettent par un retard prolongé ou qui menacent la mise en œuvre de l’Accord.
En ce qui concerne le Centre, le Conseil exhorte les autorités maliennes à convenir, avant la fin du Mandat actuel de la MINUSMA, d’une stratégie de politique globale et inclusive visant à lutter contre les causes profondes et les facteurs des conflits violents, à protéger les civils, à réduire les violences intercommunautaires et à rétablir la présence et l’autorité de l’État, ainsi que les services sociaux de base dans le centre du Mali, en tenant compte de la nécessité d’offrir une protection supplémentaire aux femmes et aux enfants rendus vulnérables du fait de leur situation et aux groupes marginalisés, et à assurer sa mise en œuvre effective, exhorte également les autorités maliennes à combattre l’impunité des violations des droits humains et des atteintes à ces droits, et des violations du droit international humanitaire, en menant des investigations en cas d’allégations de tels crimes, en garantissant à la MINUSMA la liberté de circulation afin qu’elle puisse s’acquitter de son mandat lié aux droits humains, en traduisant en justice les auteurs présumés, et en informant la population malienne de l’état d’avancement des enquêtes et des poursuites judiciaires, notamment les familles de victimes, à lutter contre le trafic d’armes et à désarmer sans plus attendre toutes les milices par l’intermédiaire de programmes de désarmement, démobilisation et réintégration, à appuyer les initiatives de réconciliation et à faire progresser celles visant à réduire la violence de proximité.
Le Conseil de sécurité affirme que la responsabilité de la protection des civils au Mali incombe au premier chef aux autorités maliennes. Il demande instamment aux autorités maliennes de prendre rapidement des mesures pour protéger les civils dans tout le pays et pour prévenir et limiter au minimum les dommages que peuvent causer aux civils les opérations des Forces de défense et de sécurité maliennes et y remédier.
Dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali, de la transition politique et des élections, le Conseil de sécurité exhorte les autorités maliennes à mettre en œuvre les mesures prioritaires suivantes et lui demande :
De faire des progrès tangibles, qui devront être évalués par un mécanisme de suivi solide au sein duquel le Gouvernement est pleinement engagé, en vue d’achever la transition politique, le rétablissement rapide de l’ordre constitutionnel et la remise du pouvoir à des autorités civiles démocratiquement élues, en coopération avec la CEDEAO pour parvenir à un accord, en organisant des élections libres et régulières et, selon qu’il conviendra, un référendum constitutionnel, de manière transparente et inclusive, auxquels les femmes, les jeunes, les réfugiés maliens et les personnes déplacées à l’intérieur du pays pourront participer pleinement, effectivement et sur un pied d’égalité ;
De veiller à ce que tous les processus électoraux respectent les normes internationales en matière de droits humains relatives aux élections, notamment en ce qui concerne le traitement des membres des partis d’opposition, des professionnels des médias et des membres de la société civile. Le Conseil de sécurité rappelle qu’il a été décidé que le Chef de la transition et le Premier Ministre de la transition ne devaient en aucune circonstance être candidats à la prochaine élection présidentielle, et souligne combien la confiance, le dialogue et l’esprit de compromis sont nécessaires à une transition consensuelle et inclusive, qui pose les fondements d’un pays plus stable, plus démocratique et plus paisible ;
D’assurer l’élaboration par toutes les parties prenantes maliennes d’un plan complet de redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes réformées et reconstituées dans le nord du Mali, notamment dans l’objectif qu’elles assument la responsabilité de la sécurité ;
D’assurer la participation pleine, égale et véritable des femmes dans tous les mécanismes du Comité de suivi de l’Accord, dont ses sous-comités, et rendre opérationnel l’observatoire des femmes, y compris ses antennes régionales ;
De restaurer la présence et l’autorité de l’État au centre du Mali, en déployant les forces de sécurité intérieure, la justice et les services sociaux de base, en assurant leur opérationnalité, leur réactivité et leur responsabilité, et en mettant en place des mesures concrètes et un système de suivi des progrès à cet égard ;
D’intensifier les efforts faits pour renforcer la lutte contre l’impunité et amener tous les auteurs de crimes impliquant des violations des droits humains et des atteintes à ces droits ainsi que des violations du droit international humanitaire, y compris des violences sexuelles ou fondées sur le genre et la traite des personnes, à répondre de leurs actes devant la justice sans délai et note à cet égard que les autorités maliennes continuent de coopérer avec la Cour pénale internationale, conformément aux obligations souscrites par le Mali au titre du Statut de Rome, pour les questions relevant de la compétence de la Cour ;
De poursuivre avec l’aide de leurs partenaires, leur action en faveur d’un développement socio-économique durable et inclusif au centre du Mali, notamment par des projets de développement de l’éducation, des infrastructures et de la santé publique, en accordant une attention particulière à la jeunesse.
Le Conseil de sécurité décide que le Mandat de la MINUSMA comportera les tâches prioritaires ci-après :
• Appui à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali et à la pleine réalisation de la transition politique
Il s’agit de : l'appui à la mise en œuvre des réformes politiques et institutionnelles qu’il prévoit, en particulier dans sa partie II, notamment pour soutenir les efforts du gouvernement pour la restauration effective et l'extension de l'autorité de l'État et l'état de droit sur l'ensemble du territoire, y compris en soutenant le fonctionnement efficace des administrations intérimaires dans le nord du Mali dans les conditions fixées par l'Accord ; l’appui à la mise en œuvre des réformes politiques et institutionnelles prévues ; l’appui à la mise en œuvre des mesures de défense et de sécurité notamment celles relatives au cessez-le-feu, à l’appui au cantonnement, au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration des groupes armés, ainsi qu'au redéploiement progressif des forces de défense et de sécurité maliennes au nord du Mali ; appui à la mise en œuvre des mesures de réconciliation et de justice, en consultation avec les parties ; soutenir, dans la limite de ses ressources et de ses zones de déploiement, la tenue d'élections locales inclusives, libres, équitables et transparentes, notamment en fournissant une assistance logistique et technique appropriée et des dispositifs de sécurité efficaces, conformément aux dispositions de l'Accord.
• Appui à la stabilisation et au rétablissement de l’autorité de l’État dans le centre du pays
Soutenir la stabilisation et le rétablissement de l'autorité de l'État dans le Centre, y compris le soutien aux autorités maliennes pour réduire la violence et les tensions intercommunautaires en utilisant ses bons offices ;
Soutenir le redéploiement des Forces de défense et de sécurité maliennes dans le Centre du Mali, y compris par le biais d'un soutien opérationnel, logistique et de transport continu pendant les opérations coordonnées et conjointes, la planification, le partage renforcé des informations et l'évacuation médicale, dans les limites des ressources existantes, sans préjudice des principes de base du maintien de la paix ; et aider les autorités maliennes à faire en sorte que les responsables des violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire soient tenus responsables et traduits en justice sans délai ;
Protection, sans préjudice de la responsabilité principale des autorités maliennes, des civils sous une menace imminente de violence physique et protection spécifique des femmes et des enfants touchés par les conflits armés ; en appui aux autorités maliennes, à prendre des mesures actives pour anticiper, dissuader et répondre efficacement aux menaces contre la population civile, notamment dans le Nord et le Centre du Mali, à travers une approche globale et intégrée, et, à cet égard : - renforcer les dispositifs d’alertes rapides et intensifier les efforts pour surveiller et documenter les violations du droit international humanitaire et les violations et abus du droit international des droits de l'homme, - renforcer l'engagement communautaire et les mécanismes de protection, y compris l'interaction avec les civils, la sensibilisation communautaire, la réconciliation, la médiation, l'appui à la résolution des conflits locaux et intercommunautaires et de l'information du public, - prendre des mesures mobiles, flexibles, robustes et proactives pour protéger les civils, y compris par le déploiement de moyens terrestres et aériens, selon les disponibilités, dans les zones à haut risque où les civils sont les plus menacés ;
Bons offices, mesures de confiance et d’encouragements aux niveaux national et local, afin de soutenir le dialogue avec et entre toutes les parties prenantes vers la réconciliation et la cohésion sociale et de soutenir les efforts visant à réduire les tensions intercommunautaires, en gardant à l'esprit la responsabilité principale des autorités maliennes ;
Assistance aux autorités maliennes dans leurs efforts pour promouvoir et protéger les droits de l'homme, en particulier dans les domaines de la justice et de la réconciliation, y compris un soutien, dans la mesure du possible et approprié, à leurs efforts, sans préjudice de leurs responsabilités, pour traduire en justice les responsables de violations graves des droits de l'homme ou du droit international humanitaire, en particulier les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité au Mali ; et surveiller, aider à enquêter et faire rapport au Conseil de sécurité et publiquement, sur les violations du droit international humanitaire et sur les violations et abus des droits de l'homme, y compris toutes les formes de violence sexuelle et sexiste et les violations et abus commis contre les femmes et les enfants partout au Mali et à contribuer aux efforts de prévention de ces violations et abus ;
En soutien aux autorités maliennes, en contribuant à la création d'un environnement sûr pour l'acheminement de l'aide humanitaire dirigée par des civils, conformément aux principes humanitaires, et au retour volontaire, sûr et digne ou à l'intégration locale ou à la réinstallation des déplacés internes et les réfugiés en étroite coordination avec les acteurs humanitaires ; et contribuer à la création d'un environnement sûr pour les projets à impact rapide, en appui direct à la mise en œuvre de l'Accord dans le Nord ou en réponse à des besoins spécifiques dans le Centre sur la base d'une forte analyse des conflits ;
Protection du personnel des Nations Unies, notamment du personnel en uniforme (militaire et police des Nations Unies), des installations et du matériel et assurant la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé ;
Le mandat de la MINUSMA comprend également des questions intersectorielles touchant tous les aspects de son mandat : communication avec la population malienne pour faire connaître son mandat, son rôle, ainsi que pour souligner le rôle et les responsabilités des autorités maliennes concernant la protection des civils et la mise en œuvre de l’Accord et, la prise de mesures visant à lutter contre la désinformation et la mésinformation ; la politique de tolérance zéro des Nations Unies sur l'exploitation et les abus sexuels ; l'égalité des sexes et la pleine participation et représentation des femmes à tous les niveaux dans le processus de stabilisation ; la protection des enfants, en particulier dans le contexte du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration et dans la réforme du secteur de la sécurité afin de mettre fin et de prévenir les violations et les abus contre les enfants ; examen des incidences environnementales des activités de la MINUSMA, conformément aux résolutions applicables et pertinentes de l'Assemblée générale.
More Info : Résolution 2640 (2022)