Protéger celles et ceux à qui il reste si peu

5 juillet 2022

Protéger celles et ceux à qui il reste si peu

Dans la nuit du 18 au 19 juin 2022 à Diallassagou, village de 4 137 habitants (dans la commune du même nom de 32 100 habitants) dans le Centre du Mali, une cinquantaine de personnes, tous des civils ont trouvé la mort, victime de la violence aveugle de groupes armés terroristes venus imposer leur autorité. Le village s’est ensuite quasiment vidé de sa population à la recherche d’un lieu plus sûr pour eux-mêmes et pour les rares biens qui leur restaient. Plusieurs maisons, commerces et biens ont été ciblés et volontairement incendiés par les assaillants.

Immédiatement après cet événement tragique, les 20 et 21 juin, les autorités régionales et une délégation ministérielle dirigée par le Colonel-Major Ismael WAGUÉ, transportée par un hélicoptère de l’Armée de l’Air, ont effectué deux visites à Diallassagou avec l’appui de la MINUSMA pour évaluer l’ampleur de la violence et ses conséquences sur les communautés, notamment ceux qui n’ont pas eu d’autre choix que de rester au village malgré la peur d’une autre attaque. Le principal besoin exprimé était d’avoir plus de sécurité pour protéger leurs vies et leurs biens, reprendre leurs activités économiques pour envisager de reprendre un cours normal de la vie après cet épisode traumatisant.

Ces missions d’évaluation ont permis aux autorités nationales de déployer des unités des Forces armées maliennes dans le village. La MINUSMA a aussi déployé temporairement des éléments du bataillon du Sénégal, déployé à Sévaré afin de soutenir leurs frères d’armes Maliens. Cette présence conjointe a d’ores et déjà commencé à donner des résultats avec le retour progressif des populations déplacées qui ont commencé à regagner leurs foyers et à reconstruire leurs propriétés détruites. En attendant la réponse humanitaire et dans l’urgence, les éléments du contingent sénégalais, établis en Base temporaire d’opération, ont offert aux communautés des soins de santé gratuits ainsi que des médicaments. Cette activité a d’ailleurs permis de sauver la vie d’un bébé d’un mois dont la mère venait de décéder des suites de son accouchement. Sans lait maternelle et sans aucun substitut, la malnutrition menaçait d’avoir raison de la vie du nourrisson.

Engagement et soutien de la MINUSMA auprès des victimes

Afin de réaffirmer l’engagement et le soutien de la MINUSMA auprès des victimes, le Chef de la MINUSMA, El-Ghassim WANE, s’est lui aussi rendu à Diallassagou le 27 juin avec le Gouverneur de la région de Bandiagara et le préfet de Bankass. Les communautés leur ont réitéré leur besoin de sécurité au-delà de tout autre aspect. La tension est palpable mais le désir de tourner la page avec l’accompagnement des autorités nationales a été clairement exprimé pour permettre aux déplacés de revenir chez eux dans la dignité et en toute sécurité. En effet, c’est dans une atmosphère calme mais, où les stigmates de la violence des 18 et 19 juin 2022, sont toujours présents que quelques rares commerçants ont repris leurs activités.

Retour à Ogossagou

À l’occasion de cette visite dans le Centre du pays, le Chef de la MINUSMA s’est également rendu à Ogossagou, localité du Cercle de Bankass qui a aussi été victime d’un cycle de violence entre des communautés qui ont pourtant, jusqu’alors, vécu en harmonie. Les massacres de mars 2019 et de février 2020 avaient fait plus de 200 morts au sein des deux communautés. Une série de dialogues intercommunautaires et d’initiatives de médiation entreprises par le ministère de la Réconciliation nationale et la MINUSMA avait permis en octobre 2021, d’aboutir à un accord local de paix. Les acquis restent encore très fragiles mais aujourd’hui ce qui oppose les deux communautés est de loin de moindre importance que leurs intérêts communs. Lors de sa rencontre avec ces communautés, El-Ghassim WANE leur a rappelé que le plus grand succès qu’elles puissent rencontrer est de bâtir elles-mêmes la paix. En revanche, a-t-il averti, « le plus grand risque que le Mali encourt est la poursuite des querelles fratricides entre communautés ». Il les a alors encouragées à s’inscrire dans la voie de la réconciliation et de la concorde afin « que le sang cesse de couler et qu’elles puissent envisager l’avenir ensemble sans distinction ethnique pour le plus grand bien des générations futures ». Il les a exhortées, à partir de cette rencontre à régler les différends restants. Afin de donner une chance à la réconciliation et à l’accord local de paix, la MINUSMA a développé à la demande des communautés, un projet de périmètre maraîcher géré conjointement par les deux communautés qui devrait générer des revenus mais aussi de quoi diversifier l’alimentation des familles.

Les Forces de défense et de sécurité maliennes et la MINUSMA en première ligne pour la protection des civils

Cette visite a aussi permis au Chef de la MINUSMA d’apporter son soutien aux éléments du bataillon du Sénégal déployé dans la région de Mopti, dans le Centre du pays. Leur présence auprès des communautés d’Ogossagou en collaboration avec les FAMa stabilise leurs relations et leur procure une sécurité contre les velléités d’agression des groupes armés terroristes. Les Casques bleus sénégalais patrouillent régulièrement dans cette zone qui a vu ces derniers temps une résurgence de la violence avec une multiplication inquiétante des foyers de tension. Ces efforts sont soutenus par les patrouilles conjointes de la Police des Nations unies (UNPOL) et de Police ainsi que de la Gendarmerie nationale sur les axes majeurs tels que la Route nationale 15 (Route du poisson), essentielle au désenclavement de la région de Bandiagara. Pour la reprise et la redynamisation des échanges commerciaux, UNPOL aux côtés des partenaires maliens sécurise plusieurs marchés hebdomadaires, permettant ainsi aux populations d’échanger biens et services.

Coordination et mutualisation des efforts avec les Forces armées maliens et les institutions

Afin de réduire l’impact de la présence des groupes armés terroristes sur les populations locales, lors de ses rencontres avec les Gouverneurs des régions de Bandiagara et de Mopti ainsi que le Commandant du Théâtre-Centre de l’Opération Maliko, El-Ghassim WANE a rappelé que seule la coordination et les mutualisations des efforts entre les FAMa et la MINUSMA permettront de faire une différence dans la sécurité et la protection des civils. Auprès de ces interlocuteurs, il a aussi rappelé le rôle d’accompagnement et non de substitution de la MINUSMA, raison pour laquelle une collaboration plus étroite permettrait un impact plus important dans les efforts de stabilisation des régions du Centre du Mali. À cet égard, il a appelé à ouvrir une nouvelle phase destinée à améliorer les conditions de vie des populations car « le destin du Mali est avant tout entre les mains des Maliens ».