Un fonds d'assistance pour faciliter l'accès à la justice aux victimes

20 juin 2015

Un fonds d'assistance pour faciliter l'accès à la justice aux victimes

Le Représentant du Haut-Commissaire aux droits de l’homme au Mali et Directeur de la Division des droits de l’homme de la MINUSMA, Guillaume Ngefa, a lancé, à Tombouctou, le 17 juin dernier, le programme du Fonds d'affectation à la protection et à l'accès des victimes de violences sexuelles à la justice. Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme y contribue  à hauteur de 30, 000 USD, au profit de 15 femmes survivantes.

 

Ce fonds vise à soutenir les activités de la protection des victimes de violences sexuelles et les témoins tout en renforçant le rôle de la société civile et des organisations de victimes dans le processus de la justice transitionnelle. Plus d’une centaine de personnes, dont des membres d’organisations de victimes et de défenses des survivants, des leaders d’organisations de la société civile de la Cité des 333 Saints ainsi que des notabilités ont assisté à cette activité.

 

Un important travail de monitoring et de documentation, mené par des officiers des droits de l’Homme de la MINUSMA, en étroite collaboration avec les associations de victimes locales, a permis d’identifier celles d’entre elles qui doivent en bénéficier. « L’évaluation des rapports de nos bureaux de terrain ont fait ressortir qu’une catégorie de victimes, dont les femmes, avaient souffert dans le silence pendant la crise. C’est pour cette raison que nous appuyons une coalition d’organisations maliennes qui nous a demandé d’aider à permettre l’accès à la justice aux victimes », a souligné M. Guillaume Ngefa. 

 

La mise en place de ce fonds répond aux besoins réels d’accompagner les nombreuses victimes de graves violations des droits de l’homme durant l’occupation du Nord du Mali en 2012, pour :

-              Leur fournir les moyens nécessaires facilitant leur accès à la justice

-              Permettre la protection des témoins et des familles devant contribuer au processus

-              Couvrir les dépenses et les honoraires des avocats en vue d’une meilleure représentation des victimes par devant la Cour.

 

La gestion de ce fonds se fera par un comité de pilotage, présidé par la Division des droits de l’homme de la MINUSMA. Il est composé de six organisations de la société civile malienne, à savoir, WILDAF-Mali, AMDH, FIDH, AJM, DEME-SO, le Collectif Cri de Cœur, toutes représentées à la cérémonie de lancement. Ces dernières se sont regroupées au sein d’une coalition qui a, par le biais d’un pool d’avocats, porté plainte à deux reprises, avec constitution de partie civile, le 12 novembre 2014 au nom de 80 victimes et, le 6 mars 2015 pour demander justice et réparations pour 33 victimes de Tombouctou, contre 15 auteurs présumés de violations de droits humains.

 

Me Moctar Mariko, Président de l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH) a fait observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la crise malienne. Lors de son intervention, l’homme de loi en a profité pour faire un plaidoyer en faveur de la mise sur pied d’enquête pour alimenter les poursuites contre des auteurs des violations graves de droits humains et de l’adoption d’un cadre légal spécifique à la protection des victimes et des témoins.   

 

Accéder à la justice pour retrouver la dignité

 

L’accès à la Justice, un pilier transversal des mandats de la Division des droits de l’homme et de la Section des Affaires judiciaires et pénitentiaires de la MINUSMA, est l’une des premières et cruciales étapes dans la lutte contre l’impunité. Dans le même registre, le Haut–Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a fait de la protection  des victimes une priorité. Ainsi, pour le Haut-Commissariat et la Mission onusienne, la possibilité de rendre justice et d’assurer aux victimes des recours utiles figure parmi les préoccupations majeures dans le cadre du conflit au Mali.

 

Ce programme de Fonds d'affectation à la protection et à l'accès des victimes à la justice de violences sexuelles fait partie des efforts des Nations Unies, en général et du Haut-Commissariat des droits de l’homme, en particulier pour contribuer à la lutte contre l’impunité au Mali. « Des femmes de Tombouctou, ont été victimes d’esclavage sexuelles. Il est temps que ces femmes-là retrouvent leur dignité en accédant à la Justice, à la vérité afin d’assurer le principe de la non-répétition et de punir les auteurs de ces atrocités », a fait remarquer le Représentant du Haut-Commissaire aux droits de l’homme au Mali.

 

Dans son allocution, la Cheffe du Bureau Régional de la MINUSMA à Tombouctou a invité les organisations de droits humains, les parajuristes, la société civile en général et les bénéficiaires du programme, en particulier, à s’approprier ce Fonds d'affectation à la protection et à l'accès des victimes à la justice, pour en faciliter la mise en œuvre. « La communauté internationale, à travers les Nations Unies, tient à renforcer les efforts déjà déployés par l’Etat malien pour mettre les moyens à la disposition des victimes en termes d’accès à la justice », a réaffirmé Cecilia Piazza.

 

Effectivement, au niveau national, des avancées significatives sont à souligner : dans un arrêt du 21 janvier 2013, la Cour Suprême a désigné le Tribunal de Première Instance de la Commune III de Bamako pour connaitre les cas de violation liés au conflit. Le Directeur du Cabinet du Gouverneur de la Région de Tombouctou, M. Bakary Hamadi Traoré, a remercié les Nations Unies et a déclaré que ce financement fait tomber divers obstacles entravant l’accès à la justice, notamment les difficultés financières pour les déplacements des victimes à Bamako.

 

La cérémonie officielle du programme a eu lieu à l’amphithéâtre de l’Institut de Hautes Etudes et de recherches islamiques Ahmed Baba, en présence d’un représentant de la délégation de 16 personnes venues de Bamako parmi lesquelles le chargé de coopération à l’Ambassade de France au Mali, Jordi Ferrari ; un consultant du PNUD, Thomas Gil christ ; et la Cheffe de l’Unité de protection de la femme de la MINUSMA, Bernadette Sene. Entre autres personnalités de Tombouctou, étaient aussi présents, le Président du Tribunal de Première Instance de Tombouctou, Kone Soungalo; les autorités policières et militaires nationales ainsi que celles de la MINUSMA. 

 

La Division des droits de l’homme de la MINUSMA est engagée dans ce projet comme mobilisatrice de la solidarité des bailleurs, d’accompagnatrice des acteurs nationaux et des victimes dans la recherche de la vérité et de la justice. D’autres, comme la Coopération française, vont s’ajouter sur la liste des donateurs de ce projet qui s’étendra à l’ensemble du territoire national.