Cantonnement : intervention du Directeur SSR/DDR de la MINUSMA

11 janvier 2016

Cantonnement : intervention du Directeur SSR/DDR de la MINUSMA

Cantonnement : intervention du Directeur SSR/DDR de la MINUSMA
 
POINT DE PRESSE HEBDOMADAIRE DE LA MINUSMA
BAMAKO, 7 JANVIER 2016
Samba Tall: Bonjour et merci de nous avoir invités à venir contribuer un peu à cette activité hebdomadaire et merci aussi à tous les membres de la presse malienne et internationale, qui ont bien voulu être des nôtres ce matin.
Je suis Samba Tall, le Directeur de la Réforme du Secteur de Sécurité et du DDR de la MINUSMA. Je tenais à vous informer de là où on en est en matière de cantonnement.
Comme vous le savez sous la direction du Gouvernement malien, la MINUSMA avec d’autres partenaires internationaux doivent appuyer le processus de cantonnement qui doit être mis en œuvre par toutes les parties signataires de l’Accord d’Alger.
En effet, le cantonnement est l’une des mesures de confiance qui ont été instituées dans cet Accord de paix et qui permettent d’avancer vers d’autres étapes de ce processus que sont le DDR et la Réintégration ou l’intégration.
Cela veut dire qu’il y a des préalables à ce cantonnement. Le préalable à ce cantonnement, c’est d’abord la création des commissions nationales qui vont gérer tout ce processus. Vous avez la Commission Nationale de DDR, qui doit gérer tout le processus de DDR, qui consiste en fait à démobiliser les gens et à les ramener à la vie civile économique.
Vous avez concomitamment le processus de réintégration ou d’intégration dans les forces de sécurité, là aussi vous avez une commission nationale. Il y a également un Conseil national de sécurité qui existe déjà au Mali qui doit chapeauter tout ce processus, ce sont les préalables à mettre en place.
Une fois que ces préalables sont satisfaits, on cantonne les combattants.
Les mouvements qui sont signataires regroupent eux-mêmes leurs combattants sur des sites qu’ils auront proposés. Mais ces sites doivent être validés par la Commission Technique de Sécurité, qui est un organe du Comité de suivi de l’Accord.
Une fois que les gens sont regroupés sur ces sites, il faut les enregistrer, il faut les sensibiliser sur les possibilités qui s’offrent à eux. Soit s’ils veulent rejoindre la vie civile, soit s’ils veulent rester quelque part sous les armes et sous les services de sécurité du Mali et c’est un processus qui prend du temps.
A la date d’aujourd’hui, le Gouvernement et les parties signataires se sont déjà entendus sur ces deux commissions, la Commission nationale de DDR et la Commission d’intégration. Le projet de décret a été adopté et va être signé prochainement. Après, il faudra nommer les membres de ces commissions. Ces membres une fois nommés, doivent travailler sur les critères de DDR et sur les critères d’éligibilité pour les forces de sécurité. Il y a encore du travail qui nous attend pour les semaines à venir.
Pour anticiper sur cela, on a demandé à la MINUSMA de construire et d’aménager ces sites de cantonnement qui ont été validés par la CTS c’est de cela dont ma Collègue vous parlait tout à l’heure. Depuis le 29 décembre on a commencé à construire ces sites de cantonnement. Le but étant que quand ces commissions nationales auront achevé leur travail d’établissement des critères qu’on n’ait pas attendre car les sites seront déjà prêts. Voilà en gros le processus dans lequel on est.
Il y a encore un travail politique qui est en train d’être fait entre toutes les parties signataires sous la direction du Gouvernement, les partenaires internationaux, qui sont en appui et jouent aussi leur part. Concomitamment, pendant que ces deux commissions vont être installées et travailler, la MINUSMA a aussi l’obligation et la tâche de construire ces sites de cantonnement.
Aujourd’hui, voilà là où on en est et nous pensons que cette étape qui est très importante dans la mise en œuvre du processus de paix. Parce que quand vous cantonnez les gens, d’abord vous réduisez la circulation des hommes en armes, qui seront mieux contrôlés et cela a un effet sur la sécurité. Ensuite comme je l’ai dit en préambule, c’est l’une des mesures vraiment de mise en confiance qui ont été mises dans l’Accord de paix dont signature a été parachevée le 20 juin 2015 pour mettre les parties signataires en confiance pendant une certaine période et ensuite leur permettre d’aller vers ce qui fera la paix. C’est-à-dire que les gens qui sont sous les armes et qui ne veulent pas rester sous les armes, aient un avenir économique et un devenir dans la société. Que ceux qui veulent intégrer ou réintégrer les forces de sécurité le fassent dans un cadre concerté et dans le cadre des lois de la République du Mali. Voilà ce qu’on tenait à porter à votre connaissance et vous avez besoin d’éventuels éclaircissements je suis à votre entière disposition.
Questions/Réponses
Q- Selon votre estimation à quelle date on peut voir les premiers éléments cantonnés et d’ici combien de temps tout ce travail pourra être fait pour pouvoir cantonner tous les combattants ?
Q- Je voudrais savoir si on déjà avoir une idée du budget DDR et quels sont les pays partenaires également ?
Q- On parle d’un problème de financement du processus de DDR, je voudrais savoir qu’en est-il ?
Q- Est-ce qu’on peut connaitre le nombre de sites confirmés ?
Samba Tall : La date de début du cantonnement, à cette question on aimerait bien y répondre, mais ceux qui ont la réponse ce sont les parties signataires. Car ce sont les parties signataires qui décident de cantonner et pour cantonner il faut qu’il y ait des critères. A la date d’aujourd’hui il y a un mode opératoire de cantonnement. Les parties se sont entendues sur les critères. Qui doit être cantonné ?
Ce mode opératoire de cantonnement, il existe et a été conçu par la Commission Technique de Sécurité et adopté par le Gouvernement, la Plateforme et la CMA. Maintenant, il y a des préalables. Quand vous cantonnez quelqu’un qu’est-ce que vous allez faire de lui après ? C’est ce qu’on a dit tantôt. Tous ces gens qui sont des combattants, doivent être soit démobilisés pour rejoindre la vie civile donc c’est le DDR, soit être réintégrés ou intégrés dans les services de sécurité de la République du Mali. Ce sont ces critères qui n’existent pas encore. Parce que les commissions qui doivent le faire, la Commission nationale de DDR et la Commission nationale d’Intégration, ne sont pas constituées encore et les décrets les établissant n’ont été adoptés en Conseil des ministres que le 29 décembre 2015 passé. Donc ces décrets doivent être signés et les membres de ces commissions nommés et une fois nommés, il faut qu’ils s’asseyent pour travailler et pour établir ces critères. La vitesse à laquelle ils vont travailler déterminera effectivement la date du début du cantonnement et je peux vous dire que ce n’est pas un travail de deux jours, c’est un travail en profondeur parce que ça touche aux institutions et aux structures de l’Etat malien.
C’est le travail de ces commissions, la nomination de leurs membres, les travaux qu’ils vont produire qui vont nous donner effectivement la date du début du cantonnement.
La question qui a trait au budget du DDR, même chose, on a une très forte volonté de tous les partenaires internationaux d’appuyer le DDR au Mali. La preuve est qu’on a déjà quelques fonds avec lesquels on a commencé à construire les sites de cantonnement alors qu’on ne sait même pas le nombre de gens à cantonner et je vous renvoie à la lecture de l’Accord d’Alger. L’Accord d’Alger dit que les mouvements signataires doivent fournir la liste de leurs hommes et de leurs équipements militaires 30 jours après la signature de l’Accord. L’Accord a été parachevé le 20 juin. Cela veut dire que la liste devait être parachevée le 20 juillet et nous seront très bientôt le 20 janvier.
Mais la CMA et la Plateforme ont promis fermement qu’ils vont fournir ces listes en mi-janvier. Nous pensons avoir ces listes incessamment. Ce sont ces listes qui vont nous permettre d’établir le budget du DDR. On ne peut pas faire le budget si on n’a pas l’effectif mais de ce côté, je vous rassure qu’il y a une très grande volonté des Nations Unies et de tous les partenaires pour réellement appuyer ce processus.
Problème de financement du DDR, je crois que j’y ai répondu et il n’y a pas de problème de financement du processus de DDR. C’est la même chose, le processus de DDR, il doit commencer après le cantonnement.
D’ores et déjà, les institutions internationales qui d’habitude appuient le DDR des Nations Unies, c’est le Fond Monétaire International (FMI), c’est la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement (BAD) et toutes ces institutions se sont dites prêtes à appuyer le processus de DDR et nous n’avons pas d’inquiétude de ce côté. C’est juste qu’il nous faut réellement la liste des combattants et des effectifs pour pouvoir aller dire aux gens qu’on a besoin de tel montant pour le DDR.
Le nombre de site à la date d’aujourd’hui: la CMA a proposé 12 sites de cantonnement et la Plateforme a proposé 12 sites de cantonnent et cela nous fait un total de 24. Et ces sites vont à travers le processus de la Commission Technique de Scurité. Je vous informe que la Commission Technique de Sécurité est composé de trois parties signataires, le Gouvernement, la CMA et la Plateforme. Vous avez les Nations Unies, l’Union Africaine, la CEDEAO, les cinq pays membres du Conseil de sécurité, les six pays frontaliers du Mali à l’exception du Sénégal et de la Guinée, vous avez l’Algérie, le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et autres.
Cette Commission Technique de Sécurité (CTS) a été instituée par le Comité de Suivi de l’Accord. Les sites une fois proposés par les mouvements font l’objet d’une évaluation technique. Cette évaluation technique est menée par une équipe pluridisciplinaire où vous avez le Gouvernement, les parties signataires, la MINUSMA, le Service Anti-mines des Nations Unies (UNMAS), l’UNOPS qui est le service projets des Nations Unies qui assure la construction des sites, l’Unité Environnement de la MINUSMA pour respecter l’impact environnemental de ce qui se fait. En somme, vous avez une étude technique exhaustive et cette étude exhaustive est soumise à la CTS qui siège une fois par mois en moyenne.
La CTS, au vu de cette étude technique, valide. Une fois que les sites sont validés, les mouvements signataires donnent la priorité à la construction. Vous savez qu’on ne peut pas construire des dizaines de sites en même temps, on est obligé de le faire graduellement et c’est la raison pour laquelle on construit les trois sites qui ont été proposés conjointement par la CMA et la Plateforme, je tiens à le préciser. Les trois sites que nous construisons actuellement, ils ont été initialement proposés par la Plateforme, ils sont dans les régions de Tombouctou et de Gao. Mais c’est la Plateforme et la CMA qui se sont entendues pour qu’on commence à travailler sur ces trois sites.
En gros, voilà où on en est, les autres sites sont en processus de validation. Il y a une réunion de la CTS les 14 et 15 janvier et nous pensons qu’à cette réunion on arrivera à valider 15 sites sur les 24 proposés.
Aujourd’hui a débuté la reconnaissance des sites dans la région de Kidal notamment Tessalit et Aghelhoc et ce sont des sites que nous comptons valider les 14 et 15 janvier.
Q- Sur les 24 sites proposés, pouvez-vous nous dire combien ont déjà été validés et combien sont en construction ?
Samba Tall : Sur les 24 sites proposés, 15 ont fait l’objet de reconnaissance et sur ces 15, 11 ont été validés par la CTS et 3 ont été proposés pour la construction par la CMA et la Plateforme conjointement.
Q- Est-ce qu’on peut savoir les noms des trois sites que vous construisez en ce moment ?
Samba Tall : Vous avez le site de l’Ikrakar dans la région de Tombouctou, le site de Fafa et Inéghar dans la région de Gao au sud de Ménaka. Les travaux de construction ont commencé sur les deux sites de Fafa et de l’Ikrakar. A Inéghar, on doit encore faire un travail de nettoyage parce que lors des visites techniques et dans la zone d’Inéghar, il y a eu des batailles par le passé et pour plus de sureté, on a remis l’équipe anti-mines pour aller bien vérifier le terrain. Ce n’est pas un terrain que nous suspectons d’être miné mais c’est juste par mesure de précaution. Comme il y a eu des combats c’est mieux d’avoir toutes les garanties avant de commencer les travaux. C’est cette partie de nettoyage qui a commencé mais le tout se fera en même temps et tous les trois sites seront construits concomitamment.
Q-Est-ce qu’on a une idée sur le délai de chantier ?
Samba Tall : Le délai est de deux à quatre mois tout dépend de la nature du terrain de la livraison des matériaux. Vous savez que ce sont des villages très isolés les endroits dont on parle et il faut tout amener sur place et c’est cela qui va déterminer. Nous notre but c’est de finir le plus tôt que possible. A Fafa on a déjà commencé à faire le forage parce que c’est une priorité. A partir du moment où vous avez l’eau sur un site, le reste c’est de la viabilisation. On essaye de raccourcir les délais au maximum, sachant qu’on a des contraintes géographiques pour ramener les matériaux très souvent.
Q- Après la construction des sites le cantonnement est censé duré combien de temps ?
Samba Tall : Le cantonnement est censé durer un maximum de trois mois, pas plus, parce que c’est là où on enregistre et sensibilise les combattants pour qu’ils aillent soit au DDR, soit vers l’intégration. Maintenant notre but est de le raccourcir au minimum comme je le disais tantôt si les critères pour le DDR. Quand les critères pour l’Intégration seront préalablement établis par les commissions nationales qui comprennent les membres du Gouvernement, de la CMA et de la Plateforme, il n’y a pas de raison de garder quelqu’un indéfiniment. Il rentre, on l’enregistre, on le sensibilise et il va là où il doit aller. Mais le cantonnement ne peut pas durer plus de trois mois et c’est ce qui est prévu dans l’Accord de paix : un maximum de 90 jours. Si on peut le raccourcir au minimum on le raccourcira. C’est la volonté du Gouvernement et c’est la volonté des parties signataires et nous les appuierons.
Q- Est-ce que les deux mouvements seront cantonnés sur les mêmes sites ?
Samba Tall : C’est leur choix à eux, nous on appuie. Et eux aussi ont exprimé la volonté d’être cantonné autant que possible sur les mêmes sites sous la direction du Gouvernement et nous les appuierons.
Q-Ce ne sera pas un site de repos ?
Samba Tall : Le cantonnement comme je vous l’ai dit est une mesure de confiance. Ces gens se battent depuis des années et des mois. Il faut les mettre ensemble pour qu’ils se parlent. C’est la même chose que les patrouilles mixtes pour créer la confiance entre les parties. Mais c’est une étape préliminaire. Le cantonnement doit déboucher sur quelque chose et c’est soit le DDR, soit l’Intégration. Donc la période de cantonnement, et je reviens là-dessus, c’est pour enregistrer les gens et les informer et les sensibiliser pour ensuite les faire partir là où ils doivent aller.
Q- La sécurisation des sites, ce sera à la fois les FAMAs et les casques bleus ?
Samba Tall : Dans l’Accord de paix, la sécurisation doit se faire par les parties signataires sous la direction du Gouvernement. A la date d’aujourd’hui, il y a encore des réglages à faire pour mettre en œuvre ce mécanisme conjoint entre le Gouvernement et les parties signataires.
Pour ne pas perdre de temps, la MINUSMA a déployé sur les sites qu’on construit ses forces en espérant que ce mécanisme qui est prévu dans l’Accord d’Alger sera mis en œuvre dans les jours qui viennent, les mécanismes de coordination pour coordonner tout ce qui se fait entre le Gouvernements et les mouvements signataires de l’Accord, que ce soit les patrouilles mixtes ou les mécanismes de surveillance du processus de cantonnement et de DDR.
Donc en attendant, la MINUSMA a décidé de déployer ses propres forces et de tout faire pour que ce mécanisme de coordination soit mis en place dans les plus brefs délais pour prendre le relais qui lui est dévolu au terme de cet Accord d’Alger.