Justice et réconciliation : un projet pilote de la MINUSMA pour réconcilier quatre villages du Centre

3 juin 2021

Justice et réconciliation : un projet pilote de la MINUSMA pour réconcilier quatre villages du Centre

Les 21 et 22 mai derniers, une équipe intégrée du Bureau régional de la MINUSMA a effectué deux missions de terrain visant à consolider les processus de réconciliation, entre les communautés dogons et peules des villages d'Am, Dangatene, Sabere Darah et Yorou, cercle de Koro, dans la région de Bandiagara.

Ces dernières missions menées dans ces quatre villages du Cercle de Koro, dans la Région de Bandiagara, s’inscrivent dans le cadre de la remise de trois projets de réduction de la violence communautaire. Ces projets sont financés par la MINUSMA pour près de 151 millions de francs CFA, auxquels s’ajoute une contribution locale qui s’élève à 1.4 millions de francs CFA. La dynamique de ces interventions est née de l’élan insufflé par le projet « Justice et réconciliation » initié en 2018, par la Section des Affaires judiciaires et pénitentiaires (SAJP) de la MINUSMA, dans les communes de Dioungani et Koro. Ce projet avait donné lieu à la tenue d’une série de rencontres intercommunautaires durant lesquelles, les parties ont échangé sur les causes des problèmes entre les communautés et formulé des résolutions pour la restauration de la paix entre elles.

Appuyer de manière pérenne le processus de réconciliation entre ces communautés de Koro

L’un des principaux objectifs de ces missions de terrain est d’appuyer de manière pérenne le processus de réconciliation entre les communautés d’Am, Dangatene, Sabere Darah, Yorou Pen et Yorou. Ceci, à travers des mécanismes de justice et de règlements alternatifs des conflits et litiges dans leur domaine de compétence. Lors de ces deux missions, les équipes pluridisciplinaires de la MINUSMA ont apporté leur soutien aux Comités de réconciliation (CR) dans la poursuite du dialogue intercommunautaire entre Sabere Darah, Dangatene et Yorou et fait le suivi des résolutions prises par les CR, y compris celui du village d’Am. Par ailleurs, selon les témoignages recueillis sur place, les membres du Comité de réconciliation mis sur pied par la MINUSMA ont été la cheville ouvrière des dialogues encadrés par le Centre pour le dialogue humanitaire (HD).

Situés respectivement à 20, 22, 25 et 29 km au nord-est de la ville de Koro, les villages d’Am, Dangatene, Sabere Darah et Yorou ainsi que les communautés Dogon et Peulh les composant, jadis secoués par des conflits intercommunautaires, continuent donc, près de trois ans plus tard, de bénéficier de renforcements de capacités de la MINUSMA. Ces derniers, conduits à travers l’Equipe Régionale d’Appui à la Réconciliation et les autorités locales, avaient abouti en janvier 2020 à la mise en place, de Comités de réconciliation, puis en janvier 2021, à la signature d’un accord de paix entre les communautés. Plusieurs composantes de la MINUSMA, dont la Force et la Police des Nations unies se sont impliquées dans ces réalisations.

Conduites par la Cheffe du Bureau régional de la MINUSMA dans le Centre, Fatou THIAM, ces récentes missions sont les cinquième et sixième du genre à se dérouler dans le cadre du projet pilote conjoint Justice et Réconciliation. « La paix se construit et c’est progressivement qu’on ira vers une paix durable. Les communautés ont la liberté de mouvement, ce qui n’était pas le cas quelques années auparavant. On a commencé à les accompagner depuis 2016 dans la médiation afin que ces villages se réconcilient », s’est-elle réjouie.

Trois projets majeurs pour la réduction de la violence communautaire

Les missions conduites les 21 et 22 mai derniers ont servi de cadre pour la remise officielle de trois projets majeurs financés par la MINUSMA. Les deux premiers projets de réduction de la violence communautaire (RVC) sont portés par la section de la Réforme du Secteur de la Sécurité et de du Désarmement, de la Démobilisation et de la Réinsertion (RSS-DDR) de la MINUSMA à Mopti. Pour le premier, il s’agit d’un complément au projet pilote justice et réconciliation pour la réduction de la violence communautaire et la cohabitation pacifique. Il bénéficie aux villages de Dangatené, Am, Sabéré- Darah et Yorou. À travers ce projet RVC, la MINUSMA a, d’une part, financé la réalisation d’un périmètre maraîcher avec un système d’adduction d’eau au profit des femmes et des jeunes à risques de Dangantené et ceux de Sabére-Darah déplacés à Dangantené. Il a permis, d’une part, de doter les villages de Dangantené, Am et Yorou, de six motos-tricycles équipées et recouvertes qui serviront d’ambulance pour transporter des malades au centre de santé le plus proche.

Le deuxième projet concerne l’électrification, à l’aide de panneaux solaires, des localités de Dangaténé, Am et Sabéré-Darah. Ce sont, au total, 82 lampadaires solaires que ce projet financé par la MINUSMA a permis d’installer à des points stratégiques identifiés par les autorités et notabilités locales. Pour une pérennité des réalisations, chaque ménage ou famille du village devra payer une cotisation mensuelle de 250 Francs CFA pour assurer la maintenance des lampadaires. Bénéficiant directement à plus de six mille habitants, c’est un projet qui a créé, pendant trois mois, pas moins de 55 emplois temporaires pour des travailleurs non-qualifiés, parmi lesquels 15 femmes. Il a aussi servi à former six autres jeunes, dont deux par localité bénéficiaire, qui se chargeront de la maintenance des lampadaires solaires.

Le troisième projet, porté par la Division des Affaires civiles de la MINUSMA, est axé sur la réhabilitation du système d’adduction d’eau de Yorou. Dans le cadre de ce projet, en plus de la réparation du château d’eau du village et de la réalisation d’une borne fontaine, cette localité a été dotée d’une cuve principale d’une capacité de vingt mètres cubes. Elle vient en remplacement de celle défectueuse de 10 mètres cubes. À cette nouvelle cuve s’ajoute une nouvelle pompe électrique, ses accessoires et une source d’énergie photovoltaïque. Pour P. DOUYON, membre de la communauté dogon de Yorou, l’appui de la MINUSMA est un grand soulagement, notamment à travers les projets générateurs de revenus au profit des deux communautés. Il a souligné que les villages ont su maintenir le rythme des rencontres d’échanges et de dialogue pour recoudre ensemble le tissu social endommagé.  

La délégation a également assuré le suivi de la construction en cours du mur de l'école, un projet additionnel financé par la MINUSMA. Elle a aussi saisi l'occasion pour faire le point sur les derniers développements depuis janvier 2020, date de la dernière visite de la MINUSMA dans la région. C’était l’occasion de s’enquérir davantage des préoccupations des populations, notamment celles des femmes par rapport à la pénurie croissante d'eau, à l'absence de centre de santé et au besoin d’une clôture pour leur jardin.

À Dangatene, l’équipe de la MINUSMA s'est entretenue avec les populations locales et les dirigeants locaux pour évaluer les progrès réalisés dans le processus de réconciliation. Selon ces interlocuteurs, les efforts de réconciliation, appuyés par la MINUSMA depuis 2018, se sont avérés fructueux et les villageois peuvent désormais transiter librement dans les différents villages, car les violences intercommunautaires semblent y avoir cessé. À titre illustratif, un peulh de Yorou était symboliquement venu saluer les dogons de Dangatene, lors de ces échanges.

« Entre Yorou et Dangatene, la communication par voie routière se fait désormais sans crainte. Nos amis de Yorou viennent se faire soigner dans le Centre de santé de Dangatene. Nous sommes partis leur rendre visite dans leurs villages et leur dire que nous sommes unis », a témoigné Abraham SAGARA, membre du comité. Ce projet pilote grâce auquel la MINUSMA devra faciliter à moyens termes, le déploiement et le déplacement des autorités locales dans leurs zones, vise également à contribuer à la lutte contre l’impunité, la restauration de l’autorité de l’Etat et de l’Etat de droit. 

Les Casques bleus de la Police des Nations Unies (UNPOL) ont pris une part active à ses missions, en assurant la sécurisation des composantes civiles. Dans la foulée, les Casques bleus sénégalais ont procédé à des consultations médicales gratuites et fait des dons en médicaments à plus de 280 personnes issues des trois localités.